"Un soir d ’été en Sardaigne" d'Annette Lellouche


Note de l'auteur

 

Cette Saga romanesque est un Hymne à l’Amour.

Quoi de nouveau me direz-vous ? Les troubadours l’ont mis à l’honneur, Edith Piaf l’a  chanté pour Marcel, Albert Cohen l’a écrit à sa Belle du Seigneur, Roméo et Juliette a été maintes fois joué au théâtre,
Aragon pour les yeux d’Elsa …

Quoi de neuf,insisterez-vous ? L’Amour sous perfusion.

Lorsque j’ai commencé l’écriture de ce roman, j’avais surtout envie de raconter une Saga Romanesque, une fiction, avec mes mots, mes ressentis, mon écoute et mon regard sur la société d’aujourd’hui pour être au plus proche du quotidien de mes lectrices et lecteurs.

Et bien évidemment, je voulais arriver à donner l’envie d’Aimer sans condition, sans apriori, sans honte, sans limite d’âge.

Se lâcher ! Oser ! Marquer sa différence pour Aimer avec son petit grain de folie.

La Vie ne vaut d’être vécue que sous des flashs de Bonheur, même épisodiques, même éphémères, même douloureux…


Extrait

Julien vivait en sursis depuis le jour où il avait revu Véronique. Il l’espérait tous les week-ends. En vain. Qu’espérait-il au fond ? Déterrer le passé enterré depuis l’accident de son père. Cette femme le fascinait. Son père avait-il subi la même attraction au point de se détourner de sa famille ?

Obsédante, s’imposa à sa mémoire la dernière image de Mathieu, l’honni, les bras autour de son cou, s’accrochant au père comme à une bouée.

Ce soir, le hasard fit caler sa voiture juste face à l’enseigne « Jules et Jim ».

Le hasard ou sa volonté de revoir le petit Mathieu devenu grand. Une boite de nuit qui se trouvait sur sa route et qu’il n’avait jamais remarquée. Une boite très spéciale. Des néons clignotants bleus et roses l’attiraient comme un appel onirique. Il n’avait plus remis un pied dans « ces boites à débauche » comme il les intitulait depuis sa rencontre avec Matéo. Son coeur se mit à battre dans un mouvement désordonné, descendant jusqu’à ses chevilles qui flageolaient. Il se promit de ne pas s’attarder, juste le temps d’apercevoir Mathieu, son demi-frère. Il repartirait aussitôt.

À l’intérieur, la musique battait son plein. Les ombres qui se déhanchaient sur la piste étaient mitraillées par les facettes d’une boule suspendue au plafond, tournoyant d’un mouvement lascif. Des filles et des garçons assez jeunes, phosphorescents. Des filles avec des filles. Des garçons avec des garçons. Des garçons frêles aux cheveux longs qui ressemblaient à des filles. Des filles aux cheveux très courts et aux épaules larges de catcheuses.

Il ne se sentait pas à sa place dans ce cadre, revivant brusquement le regard de cette femme sur le pas de sa porte. Implorant et dur à la fois. Il en avait des frissons dans le dos. Il l’avait haïe, l’espionnant dans ce parc où elle retrouvait son amant. Son père. Et ce petit garçon qui semblait plein de vie alors que la jalousie le laissait exsangue.

- Mathieu avait crié son père. Mathieu, viens m’embrasser, je dois partir. Mathieu, les deux bras autour du cou, les jambes enserrant la taille de Serge devenue chêne. Des bribes d’instantanés lui revenaient en mémoire, régénérées comme du café soluble dans un verre d’eau bouillante. Julien refusant d’embrasser son père en signe de représailles. Les yeux douloureux du rejeté. Sa mère offusquée. La disparition du père, un poids lourd dans sa vie.

Que faisait-il là ?

Il s’installa dans un renfoncement du bar, à l’abri des regards. À nouveau il repensa aux paroles de cette femme : « un petit garçon voyeur ». Il ne comprenait pas pourquoi il n’arrivait pas encore à la citer par son prénom, Véronique, lorsqu’une petite brunette passa devant lui en se trémoussant. Elle hurla d’une voix qui voulait couvrir la musique « salut Mathieu ». Mathieu répondit « salut » d’un bref signe de tête trop occupé à mixer les sons derrière un paravent vitré. Julien sursauta.

La réalité se confondit avec ses souvenirs. La langue fourchue d’un serpent siffla dans ses oreilles. Son Mateo et le Mathieu de ses pires cauchemars en une seule et même personne. Il vint rejoindre les danseurs sur la piste, provoquant des cris de bonheur. Toujours ce même corps filiforme, cette chaleur qui semblait irradier à la ronde et venir le happer tout entier. Son Mateo des nuits de fournaise puis de ses interminables nuits d’insomnie. Il avait le sentiment d’halluciner.

Comment ne l’avait-il pas reconnu en ce soir d’été en Sardaigne, sur cette piste de danse ?

Comment pouvait-il s’être pris d’amour pour quelqu’un qu’il avait tant détesté sans qu’aucune alarme ne se soit déclenchée dans sa tête ? Il vivait à l’instinct et cet instinct était-il en train de lui jouer un sale tour ? Trahison ! De quelle trahison parlait-il ? Julien n’en menait pas large. Il avala d’un trait son whisky et rentra chez lui. Il passa le pire moment de solitude de son existence lorsqu’il réalisa leur consanguinité.

Ils ne s’étaient pas revus depuis l’annonce de sa paternité par sa femme. Il avait gardé le secret de sa relation, désespérément. Même pas dévoilé à Elsa, sa mère. Elle n’aurait pas compris. À présent, le scénario avait empiré prenant des proportions démesurées.

Quatre ans déjà !

Sa fille Elisa, une jolie petite brunette aux yeux noirs charbon, lui avait permis de mener une existence presque paisible. Il improvisait les rôles, tout à tour, mari fidèle, père irréprochable, aimant et souriant. Il avait trompé tout son monde et lui avec. L’émotion longtemps contenue traversa l’écran de sa mémoire comme la flèche qui cherche à atteindre sa cible.

Un besoin pressant de revoir Véronique le prit à la gorge. Comme pour se venger du père. Ou pour essayer de se disculper. Ou parce qu’il ne supportait plus l’éloignement de Mateo. Il voulait tout lui raconter pour se libérer.

Le futur, il ne voulait pas y penser.

Véronique ouvrit la porte derrière laquelle s’impatientait Julien. Elle ne le reconnut pas tout de suite tant son regard était déformé par la colère, puis s’excusant le fit entrer. Il avait traversé tout Paris pour lui poser la question qui lui brûlait les lèvres :

- Saviez-vous que Serge était marié et père de famille lorsque vous l’avez rencontré ? Vous l’avait-il dit ou avait-il triché ?

Il avait toujours appelé ses parents par leur prénom. Son agressivité lui dévorait le visage redevenant l’enfant justicier prêt à lui tirer une balle entre ses deux yeux. Véronique lui répondit avec une certaine douceur comme si Serge l’avait investie d’une mission.

- Nous étions des amis d’enfance. Puis je fus sa collaboratrice durant les quelques années où il m’apprit les ficelles du métier. Sans lui je ne sais pas ce que je serais devenue, avoua-t-elle en se mordant les lèvres. Je savais tout de lui. Il y avait une photo de vous sur son bureau. Vous étiez sa raison d’être. C’était un homme fidèle.

Julien faillit s’étrangler :

- Fidèle alors qu’il trompait impudemment ma mère, vous plaisantez ou alors vous avez une drôle de conception de la fidélité ?

Véronique s’énerva soudain.


L'auteur

Après un beau succès d'estime  pour « Entrez dans la danse » et « retourne de là où tu viens » l’auteur nous livre à travers cette saga romanesque, un joli conte pour Adultes où l’Amour et la tolérance auront raison des préjugés. Un émouvant chant d’espoir pour tous ceux qui veulent y croire.